« En hiver, brasse qui veut; en été, brasse qui peut » est incontestablement l’adage qui permet le mieux d’expliquer l’histoire de la Bière de Noël. En effet, avant l’invention de la réfrigération, brasser en toute sécurité n’était pas une mince affaire durant les mois les plus chauds de l’année. Difficile d’empêcher la prolifération microbienne dans un univers chaud et humide…
Ainsi, à la fin de l’été, avec les nouvelles récoltes de céréales et de houblon à stocker, on se « débarrassait » des restes de l’année précédente qui n’avaient pu être utilisés pendant les fortes chaleurs. Un brassin unique était alors réalisé.
Riche en céréales, le malt était pour le moins fourni. Le sucre ne manquait pas et le taux d’alcool s’en ressentait, comme le corps de la bière, bien plus conséquent. On en profitait également pour placer les dernières épices. Bref du brassage de haute densité !
Produit en général au mois d’octobre, il était alors possible de le conserver plus longtemps grâce à la chute des températures du milieu de l’automne. La bière, assimilée à une bière de garde, allait continuer ainsi sa fermentation, lui apportant toujours plus de puissance et d’arômes.
Elle était conservée au moins jusqu’à la mi novembre où l’on commençait enfin à la déguster. Elle était en général disponible jusqu’à Noël, d’où son appellation.
Une bière de fête, une bière d’offrandes
Comme pour toute tradition, celle de la bière de Noël connait des nuances en fonction de l’endroit où elle est produite. Quoiqu’il en soit cette bière était toujours associée à la fête et aux offrandes.
Ainsi, dans les pays scandinaves la boisson riche en goût et en alcool permettait-elle d’aborder le solstice d’hiver avec un hommage aux dieux tous puissants, lors de célébrations hautes en couleurs et en ivresse…
En Belgique c’est en pleine explosion du métier de brasseur, à la fin du XIXe siècle, que la bière de Noël devint une véritable tradition. Elle était alors souvent offerte comme cadeau de fin d’année aux employés des brasseries ainsi qu’à leurs bons clients. Une pratique qui a traversé aisément la frontière et qui s’est imposée de la même manière en France, dans le Nord notamment.
En Allemagne, c’est pour la période de l’Avent que cette bière était proposée. Au Moyen-Âge, les moines buvaient de cette bière très riche en guise de nourriture pendant ces périodes difficiles.
Une tradition devenue impératif commercial
Aujourd’hui les brasseurs disposent avec la réfrigération des conditions idéales pour produire des bières de garde tout au long de l’année. Il n’empêche que la tradition a refait surface, cette fois pour des raisons un peu plus commerciales.
Le marché de la bière ayant connu quelques temps difficiles, proposer des produits originaux est devenu indispensable pour accrocher le client. Ainsi les brasseurs, petits et grands, se sont-ils relancés dans la bière de saison, et notamment celle de Noël.
Si certains se contentent d’une légère variante de recette et d’un relooking du packaging et de l’étiquetage, il est un fait que les bières de Noël envahissent les rayonnages des cavistes et des grandes surfaces, de même que les bars et restaurants, ce de mi-novembre à la fin des fêtes… ou des stocks.
Il n’en demeure pas moins que nombre de brasseurs établissent de belles recettes pour réaliser des bières de Noël exceptionnelles. Cela grâce à l’utilisation des malts pâles, qui donnent le corps, et des malts torréfiés qui confèrent bouche, arôme et couleur. Sans compter que les maîtres brasseurs ajoutent en général à leurs brassins des notes aromatiques en utilisant des épices telles que cannelle, coriandre, gingembre, miel, etc.
Mais comment savoir si vous avez à faire à une belle bière de Noël ? Difficile à dire, le mieux sera bien de la gouter…
Sachez toutefois qu’une bonne bière de Noël présente au minimum une belle teinte ambrée, avec un joli reflet cuivré. Sa mousse est abondante et dense. Elle possède un beau nez, où les arômes d’épices s’associent à ceux des fruits et d’un malt soutenu. A la dégustation elle emplit la bouche par sa rondeur. Elle est puissante, tant en goût qu’en teneur alcoolique (plus de 6°).