Alors que la saison des moissons commence, intéressons nous au malt, cet ingrédient majeur de la bière. Il y a quelques semaines nous sommes allés à Strasbourg visiter la malterie Soufflet qui fournit notamment la brasserie Kronenbourg d’Obernai et ce dans le cadre d’un accord sur lequel nous nous attarderons ensuite.
Mais tout d’abord plantons le décor. Nous sommes sur le Rhin, derrière le quartier Coop, en bordure d’un des canaux du port de Strasbourg. Ici tout a commencé en 1898, en tant que Minoterie des Grands Moulins de Strasbourg. Après la seconde guerre mondiale, le lieu qui a été en partie détruit par les bombardements a été transformé en malterie et n’a cessé de grandir en tant que Société des malteries d’Alsace.
Aujourd’hui propriété à 100% du leader mondial du malt, Soufflet, filiale du Groupe InVivo, la malterie produit chaque année 94.000 tonnes de malt. Pour cela ce ne sont pas moins de 200 tonnes qui sont mises en œuvre par jour.
Pour rappel le malt est principalement fabriqué à partir de l’orge, bien que d’autres céréales, comme le blé ou le seigle, puissent également être utilisées. Le site de Strasbourg produit 98% de malt Pilsen (pour les bières blondes) et 2% de malt de blé.
Le processus de maltage commence par la germination de l’orge. Pour cela les grains sont trempés dans l’eau. Puis ils sont placés sur des germoirs, des plateaux perforés afin de ventiler et éviter tout pourrissement. Une opération qui ici va prendre à peu près 4 à 5 jours.
Une fois que les grains ont germé, ils sont séchés dans un four spécial, un kiln, pour arrêter le processus de germination.
Durant cette étape le germe qui a séché peut être facilement séparé lors d’une opération ou les grains est brassé.
Le processus de maltage de l’orge (comme des autres céréales d’ailleurs) libère les enzymes présentes dans le grain qui vont être nécessaires à la fermentation ultérieure. Il faut autour de 9 jours entre le moment où on lance le process de maltage du grain arrivé par train et celui où il va repartir sous forme de malt vers les brasseries.
Parmi celles-ci, la brasserie Kronenbourg d’Obernai à quelques kilomètres de là. Les deux entreprises se sont particulièrement liées par la création en 2022 de la première filière d’orge responsable tracée en Alsace.
Cela a commencé dans les champs avec au départ 45 agriculteurs de la région Grand Est, Bourgogne. Aujourd’hui 120, sous contrat Responsable, fournissent leur orge à Soufflet Agriculture. Ce avant que la Malterie Soufflet à Strasbourg en produise le malt qui est ensuite livré à la brasserie d’Obernai. La filière s’est fixé comme objectif d’atteindre le nombre de 250 agriculteurs en 2026.
Des professionnels qui se doivent de respecter un cahier des charges garant d’une agriculture de transition grâce à la mise en oeuvre de bonnes pratiques agroécologiques.
Pour cela aujourd’hui la moitié des agriculteurs rassemble 4 ou 5 cultures différentes sur leur exploitation, l’autre moitié entre 6 à 8 cultures.
D’autre part ces exploitations disposent de près de 9 % de Surfaces d’Intérêt Ecologique, avec des jachères, des bandes enherbées, des bosquets, ainsi que des kilomètres de haies (pour la filière Orge Responsable, ce sont déjà plus de 16 km de haies au total ! Soit 2 fois plus de surface d’intérêt écologique (SIE) que le seuil fixé au niveau de la PAC et donc de multiples bénéfices environnementaux.
De même, afin de lutter naturellement contre les insectes nuisibles dans les cultures, les agriculteurs ont placé 25 nichoirs et 77 perchoirs. Et pour aller encore plus loin dans le respect de l’environnement, pas moins de 169 ruches ont été accueillies pour profiter de 17 ha de jachères mellifères, soit plus de 24 stades de rugby !
Après une année d’exploitation un premier bilan rapporte que l’empreinte carbone des orges en agriculture responsable tracée est déjà significativement inférieure à l’empreinte d’une orge cultivée en mode conventionnel : les émissions de la récolte 2022 mesurées sont de 334 KgCO2/T d’orge contre 409 pour la référence du mode conventionnel.
Pour y parvenir des efforts sont sans cesse réalisés comme une fertilisation raisonnée qui repose sur le principe de la juste dose au bon moment, des apports d’engrais fractionnés basés sur des analyses de sol annuelles et de la plantation de légumineuses qui peut être intégrée dans la rotation des cultures.
C’est aussi l’utilisation de couverts végétaux multi-espèces semés en interculture favorisant la captation de carbone et la production de biomasse.
Bien entendu cette collaboration des différents acteurs de la filière d’orge est emmenée à poursuivre son développement afin d’aider Kronenbourg SAS à tenir ses engagements. A savoir passer de 20 % d’orge tracée en 2023 à 50 % en 2024, puis 100% en 2026 pour sa 1664 Blonde.
Pour faire connaitre ces engagements, le brasseur alsacien a lancé en février dernier une plateforme connectée permettant aux consommateurs de retracer le parcours, du champs à la bouteille, de leur bière. Ce en scannant un QR code présent sur l’étiquette.
Plus de 44 000 visiteurs, dont le temps de consultation est de 3 minutes en moyenne, ont fait preuve de curiosité. La rubrique Les engagements, à savoir celle des partenaires pour la culture responsable de l’orge, la préservation de l’eau, et le transport durable est une des plus consultée.
La récolte des céréales connait elle aussi un franc succès en permettant au consommateur d’accéder aux informations concernant la zone de collecte de l’orge ainsi que sa date de récolte, sans oublier l’accés à une carte interactive.
Et bien entendu la rubrique Le brassage qui permet de découvrir les diverses étapes du brassage, mais aussi de prendre connaissance d’éléments précis sur la bière qu’il va boire, comme les dates de brassage, de maltage ainsi que le jour de mise en bouteille. Le tout accompagné de témoignages vidéo de Maîtres Brasseurs sur le savoir-faire et la création de nouvelles recettes.
Des chiffres de consultation qui sont d’autant plus appréciés par Kronenbourg et ses partenaires que le nombre de consommateurs qui scannent double tous les mois !
La Malterie de Strasbourg en images:
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