Au début de l’année nous avions rapporté le galop d’essai d’Heineken dans la bière artisanale à la pression.
Ce au travers d’accords avec 3 brasseries néerlandaises pour proposer trois bières du pays issues de brasseries artisanales, mises en fût (en Torp de 2 litres en l’occurence) à la commande.
En mai dernier nous avions rencontré, lors du Toer de Gueuze en Belgique, Paolo Bouquin, ancien Brand Ambassador de Mort Subite dans le groupe néerlandais.
Nous avons alors appris que celui-ci venait de laisser son poste pour prendre celui de Market Development Manager, et plus particulièrement en charge des marchés de la bière artisanale.
Paolo a donc visiblement bien travaillé puisqu’aujourd’hui 3 brasseries artisanales françaises voient un de leurs brassins proposé en Torp de deux litres pour The Sub.
Il s’agit de la brasserie de St Germain avec sa Page 24 Réserve d’Hilldegarde, de la brasserie Rabourdin avec la Briarde Blonde et de la brasserie Sainte Crucienne avec la Tempête du désert.
Encore une fois il s’agit ici de Torps proposées sur une période limitée. Ce à un prix de 15 euros les 2 litres (Page 24) à 17,50 euros sur le site maison La Bière Pression.
Soit des prix au litre bien plus élevés que ceux pratiqués pour leur version bouteille. Un classique pour ces fameuses Torps dont Heineken n’a jamais caché la coûteuse opération du remplissage, justifiant à leurs yeux l’écart de prix.
Une logique que le consommateur semble ne toujours pas percevoir ainsi, expliquant sans doute le succès plus que mitigé de The Sub en regard de celui du Beertender sur le marché des machines pression à domicile.
La bière artisanale ne laisse donc vraiment pas le géant néerlandais insensible. Une preuve supplémentaire après sa prise de participation minoritaire dans la brasserie parisienne Gallia.
En effet, toujours fidèle à sa politique de communication discrète, jeudi dernier, c’était par un communiqué de presse de la brasserie parisienne Gallia que l’on apprenait qu’Heineken France venait de réaliser une prise de participation minoritaire dans la brasserie de Pantin.
Gallia y explique que, 10 ans après sa création, la brasserie entre dans une nouvelle phase de développement et « ne pouvait pas répondre du fait de capacités de production limitées, ses fondateurs, Jacques Ferté et Guillaume Roy, se sont mis en quête d’un partenaire financier pour soutenir leur fort développement. Leur choix s’est finalement porté sur une entreprise du secteur, Heineken France, dont la passion pour la bière craft fut décisive ».
« Nous sommes confrontés à une forme de plafond de verre de notre production. La demande est là, mais nous n’arrivons pas à suivre. Alors même que notre ambition, notre rêve est de démocratiser la bière craft et de la rendre accessible à toujours plus de Parisiens », explique Jacques Ferté.
Grace à l’investissement de plusieurs millions d’euros (nous n’avons bien sûr pas les chiffres exacts) d’Heineken France, Gallia verra, ce dès l’automne 2020, sa capacité de production multipliée par 5 avec la construction d’une nouvelle brasserie en banlieue parisienne, à Sucy-en-Brie (94).
Cette nouvelle installation devrait également permettre la création d’une dizaine d’emplois. Elle viendra en complément de la brasserie de Pantin (93) qui bénéficiera aussi d’investissements pour devenir un véritable lieu d’expérimentation destiné aux séries plus créatives et à la quête d’un savoir-faire « à la française ». Celle-ci, ainsi que son bar attenant, demeureront des lieux de vie ouverts au public.
Parmi les innovations prévues à Pantin, un ambitieux programme de vieillissement de la bière en barriques. « Aujourd’hui, nos bières sont principalement inspirées de la scène craft anglo-saxonne. Notre raison d’être : inventer la bière française du futur. Nous voulons innover en puisant dans notre savoir-faire national, dans les domaines du vin nature ou des barriques par exemple, et ainsi se créer une légitimité brassicole » précise Rémy Maurin, son maître brasseur.
Pour ceux qui verraient dans ce rapprochement un pacte avec le diable, Guillaume Roy tient à souligner qu’« à l’origine, nous cherchions un partenaire financier pour soutenir notre croissance, qui ne soit pas forcément un acteur du secteur. Avec Heineken, et contre toute attente, nous avons trouvé un partenaire bienveillant, très à l’écoute, avec lequel nous partageons un rêve commun et la même passion de la bière craft »…
Et ce n’est pas Pascal Sabrié, Président de Heineken France qui le contredira puisqu’il se déclare « honoré et heureux de pouvoir donner les moyens à Gallia de soutenir son ambition de développement, d’apporter l’expertise d’ Heineken dans la production et la distribution de bières et d’aider cette brasserie à s’ancrer dans le territoire parisien et au-delà. Gallia va pouvoir ainsi devenir la bière parisienne de référence, comme il en existe dans chacune des autres capitales mondiales ».
Avec cette première participation du géant Heineken dans une brasserie artisanale française, c’est une nouvelle ère qui semble débuter dans l’histoire brassicole hexagonale. Jusqu’à lors, si l’on remonte à moins de 10 ans, le groupe néerlandais ne s’était, et n’avait investi, que dans des brasseries étrangères.